Qui a trahi le colonel Amirouche en 1959 ?
L’identité exacte du Juda qui a trahi le colonel Si Amirouche reste – encore aujourd’hui – un mystère irrésolu.
Nombreux sont les algéronautes qui souhaitent découvrir celui qui a transmis l’itinéraire de ce chef de guerre aux colons tricolores.
- Intermède napoléonien: L’Émir Abdelkader a t-il vraiment noué une amitié sincère avec l’Empereur des Français ? (lui qui a reçu la Légion d’honneur)
Tout comme ils souhaiteraient débusquer le nom de celui qui aurait « vendu » Ali la Pointe au capitaine Paul-Alain Léger.
Toutes ces questions – d’ordre existentielles pour la patriosphère algérienne – sont bombardées sur l’ensemble des réseaux sociaux (et associaux).
(© Capture d’écran Ina.fr | Journal Les Actualités Françaises du 1er avril 1959)
Née le 31 octobre 1926 au sein de la wilaya de Tizi-Ouzou, celui qui fut surnommé le « loup de l’Afkadou » a tenu la dragée haute aux forces françaises déployées au sein de la wilaya III.
« Les hommes d’Amirouche ne se rendent jamais »: voilà qu’elle était la devise des « maquis modèles » de celui qui fut aussi appelé le « lion du Djebel ».
- Intervalle mémoriel: Le drapeau algérien fut conçu et cousu par une Française originaire de Lorraine (et pourquoi cela dérange certains historiens du système)
Redoutable sur un champ de bataille, il l’était tout autant avec lui-même.
Mais c’est cette même redoutabilité qui se retourna progressivement contre les intérêts de la zone dont il avait le contrôle.
JT nuit du 31 mars 1959. (© Capture d’écran Ina.fr | Producteur: Radiodiffusion Télévision Française | Journaliste: François de La Grange)
Victime d’une opération d’infiltration des services français au travers du GRE – filiale nouvellement créée du SDECE – il s’est auto-convaincu qu’il était encerclé de fellaghas à la solde d’Alger.
Un de ses chefs – le capitaine Ahcène Mahiouz – a fait chauffer le pilori au point d’être surnommé « la Torture ».
Autrefois gestapiste, ce dernier n’a fait que reproduire les méthodes transmises au cours de ses longues années passées à la rue Lauriston aux côtés d’Henri Lafont – le fameux chef de la Carlingue.
Sa coercition était telle qu’il pouvait transformer un fidaï honnête en harki véreux.
(© Capture d’écran du reportage « La Bleuite, l’autre guerre d’Algérie » | Réalisateur: Jean-Paul Mari | Production: Mano a Mano | Tele-Loisirs.fr via Dailymotion)
C’est hélas le triste sort qu’a connu Tadjer Zohra – dite « Roza » – une moudjahida sincère qui, d’abord capturée par Léger, fut relâchée dans les bras de ce tortionnaire cinquième dan avant de finir en sourire kabyle.
Amirouche a quant à lui estimé qu’il ne fallait pas hésiter à toucher à la « chair fraîche » – c’est-à-dire innocente – pour « éliminer la gangrène ».
Estimant, par ailleurs, que 20% des exécutés n’avaient probablement jamais versé dans la traîtrise…
La Bleuite – nom de code donné à cette machination mise sur pied par Léger – a vérolé l’ALN jusqu’à la moelle.
Cette organisation interlope devenant ainsi son pire ennemi, bien plus dangereuse que les Français eux-mêmes.
Et lorsqu’il choisit de se rendre clandestinement à Tunis pour aller à la rencontre du GPRA – entouré de 40 djounouds d’une loyauté sans égale – il est pris en embuscade par le colonel Ducasse du 6ème RPIMa qui est parvenu à obtenir son itinéraire à l’avance.
La suite, tout le monde l’a connait: lui et plus d’une trentaine de chahids périssent tous le samedi 28 mars 1959 dans les grottes du Djebel Thameur, pilonnées sans relâche par la canonade ; seuls cinq survivront.
Mais ce que le grand public ignore encore, c’est le nom de la « baveuse » qui a balancé la trajectoire d’Amirouche au camp tricolore.
(© Capture d’écran | Source gallica.bnf.fr / BnF | Bibliographie nationale française. | dir. publ: P.-A. Berend | Auteur: Bibliothèque nationale (France). | Date: 20 novembre 1991)
Pour le Docteur Saïd Sadi – auteur en 2010 de l’ouvrage Amirouche. Une vie, deux morts, un testament – l’hypothèse de la trahison par certains de ses camarades est très réelle.
Ces derniers auraient alors divulgué aux forces coloniales le plan de trajet dans l’optique de le neutraliser.
Une perte immense pour l’effort de guerre de révolutionnaire.
65 ans après sa chute au champ d’honneur, la mémoire de ce héros de la Révolution rayonne plus que jamais.
Un grand boulevard porte aujourd’hui son nom à Alger ; artère où se trouve d’ailleurs le Ministère de l’Agriculture.
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