Yacef Saâdi, Harki malgré lui ? Mais quelle fantasmagorie...
Harki: c’est l’un des premiers mots qui est associé à Yacef Saâdi lorsqu’on tape son nom sur un moteur de recherche qui commence par un « G ».
5 lettres qui riment au sein de l’algérosphère avec collaboration, et donc trahison…
- Intermède belliqueux: Les Historiens sont-ils unanimes sur l’identité de celui qui a trahi le colonel Amirouche en 1959 ?
Pourtant, la contribution du colonel de la Zone Autonome d’Alger (ou Z.A.A) à la Révolution fut non-négligeable.
Grand timonier des moudjahidates algéroises, il fut le cerveau de toutes les turpitudes qui ont frappé la ville au milieu des années 50.
Au travers de cette poignée de main avec Monsieur Saâdi, le Président Jacques Chirac a invoqué la « paix des braves ». (© Capture d’écran Ina.fr | Producteur: France 3 | Émission: Soir 3 journal du 3 mars 2003)
Terré dans la Casbah, il déplaçait ses Dames sur son échiquier pour mettre en échec les paras déployés dans la ville à partir du lundi 7 janvier 1957 sous les ordres du général Massu ; disposant à l’époque des pleins pouvoirs.
En face de lui se trouvait un Machiavel militaire ; en la personne du capitaine Paul-Alain Léger.
- Parenthèse picturale: Le tableau de Lalla Fatma N’Soumer représente t-il un drapeau proto-kabyle ?
Ceinture noire cinquième dan dans le retournement des prisonniers, il a mis à son service des militants engagés du F.L.N ; convaincus en interrogatoire par la nécessité de maintenir à flot l’Algérie française.
Ainsi, c’est grâce à une certaine Houria – dite « la Brune » – qu’il a pu prendre en filature un agent de liaison jusqu’à la planque du colonel ; située au 3 de la rue Caton.
(© Capture d’écran Ina.fr | Émission: Panorama du 12 juin 1970 | Producteur: Office national de radiodiffusion télévision française)
Indigène au berceau, elle a débuté la bataille d’Alger en moudjahida avant de se muer en harkette sous l’influence du beau capitaine.
Sa contribution dans l’arrestation du colonel Saâdi – le mardi 24 septembre 1957 – est majuscule.
Au total, ce sont plus de 600 000 autochtones qui sont devenus Harkis entre 1954 et 1962 pour permettre au tricolore républicain de se maintenir à flot dans ses départements nord-africains.
Illusion qui a trouvé son épilogue lors de la signature des accords d’Évian en mars 1962.
La moudjahida Zohra Drif fut l’une des héroïnes de la bataille d’Alger aux côtés d’Hassi Ben Bouali et d’Ali la Pointe. (© Capture d’écran de TV5MONDE | Chaîne de L’invité | Émission présentée par Patrick Simonin le 8 mars 2012)
Néanmoins, une question demeure encore aujourd’hui sans réponse: qui a balancé la planque d’Ali la Pointe ? Localisée au 5 de la rue des Abdérames.
Plastiquée le 8 octobre, 14 jours après l’arrestation du 24 septembre, l’identité de ce dernier fait l’objet des spéculations les plus fantasmagoriques.
Moins de 62 ans auparavant, c’est un autre indigène – un certain Ahmed ben Mohamed – qui se faisait cueillir par la police franco-coloniale au 3 de la rue Caton. (© Capture d’écran | Source gallica.bnf.fr / BnF | Le Petit colon algérien | Date: 24 août 1895)
Et certains, à l’instar de l’historien franco-américain Ted Morgan – dans son ouvrage Ma Bataille d’Alger: Confessions d’un Américain au cœur d’un drame français (2016) – penchent pour Yacef.
Tout comme la fidaïa Louiza Ighilahriz qui – sur le plateau du journaliste Khaled Drareni – a confirmé que le « doute persiste » à son sujet.
En 1912, 45 ans avant la capture du colonel Saâdi, une femme résidant aussi au 3 de la rue Caton a connu le pire. (© Capture d’écran | Source gallica.bnf.fr / BnF | L’Écho d’Alger : journal républicain du matin | Date: 14 décembre 1912)
Des approximations mémorielles qui rendent difficiles l’établissement d’une vérité officielle.
Les descendants de Saâdi, en personne, sont venus défendre son blason en expliquant qu’il ne pouvait pas transmettre la nouvelle adresse d’Ali Ammar – dit « la Pointe » – dans la mesure où il se trouvait dans l’incapacité de communiquer avec ses troupes déployées sur le terrain ; du fait de son incarcération.
En 1934, soit 23 ans avant les faits, c’est le commerçant Rachid ben Saïd qui a vécu un triste malheur à cette adresse. (© Capture d’écran | Source gallica.bnf.fr / BnF | La Presse libre : journal indépendant du soir | Date: 5 septembre 1934)
La résurrection du capitaine Paul-Alain Léger – décédé la veille de l’an 2000 – permettrait peut-être d’exhumer le patronyme du mystérieux délateur de la Casbah.
À moins qu’il ne faille consulter les archives déclassifiées du S.D.E.C.E ?