Zohra Drif, la moudjahida décoloniale célébrée sur "English 4AM"

Francophone cinquième dan, Zohra Drif voit ses homélies anti-colonialistes peu à peu traduites dans la langue de Shakespeare.

Au point d’avoir la formule « English 4AM » associée à son nom sur l’ensemble des moteurs de recherche.

Elle avait 19 ans le lundi 1er novembre 1954 – date qui correspond au déclenchement d’une guerre révolutionnaire qui prit fin en mars 1962.

D’une malice ingénieuse, elle a su se déguiser en Européenne – aux côtés de Djamila Bouhired – pour déposer deux pruneaux explosifs dans le Milk Bar de la rue Michelet.

Zohra Drif TEDxTémoignage public de l’épouse de Rabah Bitat. (© Capture d’écran | TEDx Talks sur YouTube)

Moins de 56 ans après les faits, elle est même parvenue à tenir la dragée haute au Docteur BHL sur une estrade marseillaise devant un parterre de journalistes tricolores.

De par son élégance, elle fait partie de cette néo-aristocratie post-révolutionnaire.

Avocate, sénatrice et vice-présidente du Conseil de la nation, elle a troqué son treillis contre les habits d’apparatchik du régime algérien.

Sorte de Talleyrand en jupon, elle a su avec finesse et sophistication gravir les échelons de l’appareil politique d’un pays affranchi du joug colonial.

Zohra Drif Interview EnglishAux États-Unis, elle est considérée à raison comme une « Algerian Freedom Fighter ». (© Capture d’écran | Georgetown Institute for Women, Peace & Security sur YouTube)

Icône de l’algérosphère, son aura dépasse largement les frontières des terres de l’Émir Abdelkader.

En effet, nombreux sont les anglophones – assoiffés de libertés – qui consomment avec gourmandise ses prêches qu’elle délivre non sans générosité.

Hélas, ses interventions en anglais se font relativement rares.

En juin 2015, lors d’un TEDx à Alger, elle confiait à Sami Bitat (son petit-fils alors âgé de sept ans): « Tu sais, je comprends un peu l’anglais, mais je ne le domine pas. Simplement, j’ai compris ta question. »

Malgré sa timidité dans cette langue devenue internationale, son exemple inspire une horde d’apôtres du décolonialisme aux quatre coins du globe.

Si Émilie Busquant – l’épouse de Messali Hadj – avait pu prolonger son existence d’une décennie supplémentaire, nul doute qu’elle aurait pu prendre la jeune Zohra sous son aile.

Hélas, elle est décédée le 2 octobre 1953, soit un an et trente jours avant le commencement des hostilités militaires.

La maghrebosphère a toujours su – jusqu’à maintenant – rendre hommage à ces Dames qui ont refusé l’impérialisme sur leur terroir natal.

Et Zohra Drif s’inscrit assurément dans le sillage d’une Kahina ou d’une Lalla Fatma N’Soumer.